Lancer des projets en DEI, c’est vouloir faire bouger les lignes. C'est aussi parler à chacun·e de ses propres valeurs, de son histoire et de ce qu'il ou elle attend de l'entreprise ou de l'organisation.
Entre l’envie de bien faire et la crainte de heurter, d'être pris·e à parti, on peut parfois se sentir paralysé·e. Comment ces peurs se manifestent-elles, et comment les surmonter ? Voici un décryptage des blocages les plus courants, avec des exemples concrets et des pistes pour les dépasser.
1. La crainte du jugement des autres
Exemple : Lors d’une réunion d’équipe, Marion souhaite intervenir pour partager un ressenti et une demande d'action sur un comportement dont elle a été témoin. Elle hésite, de peur que ses collègues perçoivent sa prise de parole comme “moralisatrice” ou “hors de propos.” Finalement, Marion ne dira rien et son·a manager n'en saura rien.
Solution : Instaurer un climat de bienveillance et de non-jugement au sein de l’équipe. Cela peut se faire de plusieurs façons :
1° Mettez en place un temps réservé aux échanges, non directement liés à l'accomplissement des missions (temps informel comme un café hebdo ou un temps de réunion formalisé)
2° Formalisez une charte de bonnes pratiques pour établir un cadre serein pour toutes et tous, comme celle de l'Autre Cercle. Encourager l’apprentissage de chacun·e, c’est aussi créer un espace où tout le monde se sent légitime de s’exprimer.
2. L’incertitude face aux normes en constante évolution
Exemple : Hugo, responsable RH, souhaite favoriser une écriture plus inclusive dans ses communications internes mais ne se sent pas à l'aise avec l'écriture inclusive, qu'il lie forcément au point médian. Il ne sait pas comment faire et a peur de heurter.
Solutions :
1° Mettez en place un dossier partagé où mettre des ressources gratuites comme le guide sur l'écriture inclusive du HCE, qui montre les différentes possibilités.
2° Proposez une formation sur le langage et les pratiques inclusives. Se formet permet aux équipes de rester au fait des bonnes pratiques et d’être à l’aise pour participer aux discussions DEI, sans crainte.
3. Le perfectionnisme et la pression de “bien faire”
Exemple : Sarah, en charge d’un projet DEI, hésite à le lancer tant qu’elle n’a pas couvert tous les aspects possibles et identifié les modalités d'évaluation. Elle souhaite par exemple identifier chaque personne relais, dans chaque département, et cela retarde le lancement du projet.
Solution :
1° Commencez par un projet, au sein d'un seul service. Le fait de le mettre en place dans une seule direction diminue le volume d'actions à mettre en place et de choses à prévoir. Cela donnera potentiellement aussi envie aux autres services de s'engager ensuite. Choisissez une direction ou il y a déjà eu des demandes exprimées.
2° Mettez en place une action de sensibilisation ou de formation plutôt qu'un plan intégral, si rien n'a encore été fait dans votre organisation. Cela vous permettra de générer une prise de conscience, par un tiers (vous ne serez pas pris·e à partie) et d'avoir des retours de personnes voulant s'engager.
4. L’inconfort face à la reconnaissance de ses propres privilèges
Exemple : Lors d’un atelier sur les biais inconscients, Karim, directeur marketing, ressent un malaise en prenant conscience de ses privilèges, ce qu'l n'avait pas perçu. Il se demande s’il est la bonne personne pour aborder les questions d’inclusion.
Solution :
1° favoriser une animation non jugeante des ateliers, pour dire et répéter que reconnaître ses privilèges est un point de départ, et non un frein.
2° mettre en place une politique de petit pas après chaque atelier de sensibilisation ou de formation, par exemple, inciter 1 personne de l'organisation à y aller.
5. La peur de l’échec et des critiques externes
Exemple : Lucie, cheffe de projet DEI, hésite à lancer une campagne de sensibilisation pour le Mois des Fiertés, de peur que l’initiative soit perçue comme du pinkwashing, une simple opération de communication.
Solution :
1° Avant toute chose, ne lancez pas de campagne de communication si rien n'est fait ou prévu dans votre organisation, pour favoriser l'inclusion des personnes LGBTQIA dans ce cas, ou sur l'inclusion en général.
2° Préparez une communication transparente dès le départ. Expliquez que les initiatives DEI sont en phase d’évolution, que des erreurs peuvent être faites, mais que l’organisation est engagée dans un processus d’apprentissage. Cela réduit la pression liée aux attentes externes et crée une tolérance aux erreurs.
6. L’absence de soutien ou d’engagement collectif
Exemple : Thomas, salarié motivé par les initiatives d’inclusion, souhaite lancer une formation sur les stéréotypes de genre. Cependant, il se sent isolé et perçoit un manque d’engagement de la part de ses collègues, ce qui freine son envie de s’investir.
Solution : créez des groupes de travail autour des projets DEI. Ces groupes peuvent être créés sur la base du volontariat, après une action ayant favorisé une prise de conscience, comme expliqué dans le 3°. Plusieurs entreprises que nous accompagnons ont mis en place des groupes de travail sur plusieurs thématiques liées à l'inclusion. Ces groupes permettent de partager les responsabilités, de s’entraider et de montrer que l’organisation soutient concrètement les initiatives d’inclusion, renforçant ainsi le sentiment de sécurité des participant·e·s.
Dépasser la peur de mal faire dans le champ de l'inclusion et de l'égalité de genre au travail, implique d'accepter que l’imperfection fasse partie intégrante du processus et de s'entourer de personnes relais, et de confiance, pour avancer.